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Sciences Po Urba

La règle du quart : pour des projets urbains équilibrés

Vivien Garié et Timothée Turquin, anciens Cyclistes et fondateurs de l'agence Belvédère, développent avec la "règle du quart" une nouvelle approche de l'équilibre employés/habitants dans les opérations immobilières et d'aménagement.



Rééquilibrer la répartition domiciles-emplois

Le « dégonflement » des grands pôles d’emploi au profit de territoires plus résidentiels et/ou plus modestes semble indispensable à la réduction des distances domicile-travail. Comme l’énonçait dans un récent entretien à France Inter la sociologue Dominique Méda, « il devient nécessaire de rapprocher les emplois des actifs, de dé-métropoliser l’emploi et de relocaliser les activités sur le territoire ». Cela implique de favoriser le déploiement d’une nouvelle économie là ou l’emploi manque, et dans le même temps de limiter la concentration de l’emploi dans le cœur des métropoles.


Dans la région parisienne, l’énorme masse d’emplois localisés à Paris et dans sa première couronne est la raison principale de la périurbanisation francilienne. La distance moyenne domicile-travail ne fait qu’augmenter, tandis qu’à l’inverse la proximité se paie toujours plus cher, comme en atteste les prix record des logements à Paris.


Ce constat semble aujourd’hui partagé. La Société du Grand Paris indique que les projets connexes aux gares du Grand Paris Express doivent contribuer « au rééquilibrage des activités économiques en Île-de-France ». De son côté, avec la 3e édition de « Réinventer Paris », sur la thématique de la transformation d’immeubles de bureaux en logements, la Ville de Paris annonce son ambition de rééquilibrer le rapport emplois/population de la capitale, en faveur du logement. La maire de Paris, Anne Hidalgo, l’affirmait au début de son deuxième mandat : « Nous continuerons à créer des logements sur les anciennes friches ferroviaires, comme nous l’avons fait à Clichy-Batignolles, mais aussi dans les anciens hôpitaux, dans des bâtiments de bureaux reconvertis... »


À la recherche du point de bascule

Or, si l’objectif est celui du rééquilibrage afin de réduire la polarisation métropolitaine, et donc à la fois de diminuer les flux pendulaires de longue distance et de faire baisser les prix des logements parisiens, la question ne se résume pas à la production de logement, elle est d’accueillir plus d’habitants actifs que d’emplois. Dans le cas contraire, la situation s’aggrave (accentuation du déséquilibre emploi/population, donc de la polarisation, donc de la tension sur le marché résidentiel et de l’allongement des distances domicile-travail). Si un projet est équilibré, c’est le statut quo. Il y a donc un point de bascule.


D’après les chiffres de l’INSEE, l’Île-de-France compte 6 111 738 personnes actives (« occupées » ou au

chômage) parmi ses 12 174 880 habitants, soit un « taux d’actifs » de 50,2%. Avec ses « 7 500 habitants et 12 700 emplois », Clichy-Batignolles accueillerait ainsi presque 3,4 fois plus d’emplois que d’actifs. Il serait donc faux d’avancer que le projet aura contribué à rééquilibrer le rapport entre population et emploi au sein de Paris.


Qu’est-ce donc qu’un projet équilibré ? Où se situe la limite entre contribution au rééquilibrage et accentuation de la polarisation ? Le calcul n’est pas compliqué.

On peut considérer qu’en moyenne un logement mesure 65 m² et accueille 2,35 personnes dont 50% d’actifs. Il faut donc 55 m² pour accueillir 1 actif. Par ailleurs, on estime généralement qu’un immeuble de bureaux accueille 1 emploi pour 18 m². Finalement, l’équilibre « 1 emploi pour 1 actif » se traduit par un rapport m² résidentiel / m² tertiaire d’environ 3 pour 1. Autrement dit, un projet francilien équilibré devrait développer 75% de surfaces de logements et 25% de surfaces de bureaux.


D’où la « règle du quart » : pour ne pas accentuer le déséquilibre emploi/habitat métropolitain, tout projet doit borner sa composante tertiaire à 25% de la surface totale (hors programmes autres : équipements publics, commerces...).


Faute de cette vigilance, derrière une « programmation mixte » développant « à la fois des logements et des activités économiques », derrière des équilibres fonctionnels apparents, se cachent des projets qui contribuent, même sans intentionnalité, à accentuer ces déséquilibres. Agir en connaissance de causes et d’effets implique de poser une valeur de référence : la « règle du quart » nous en semble une bonne traduction.


À propos de Belvédère


Belvédère est une jeune agence d’urbanisme qui intervient, avec inventivité et rigueur, sur des projets territoriaux, urbains ; architecturaux quand ils s’en font l’écho.


Forte de la complémentarité de ses deux associés-fondateurs, elle mobilise à ces trois échelles les champs de compétence de la programmation, de la stratégie et de la spatialisation.


Orientée vers la définition du contenu des projets, elle fonde son approche sur une appréhension du système territorial et des potentialités du site, se nourrissant de prospective à l’amont et s’appliquant, à l’aval, à maîtriser les principes de mise en œuvre et de gestion.


Plus que de l’urbanisme stratégique, elle se revendique ainsi d’un urbanisme tactique, capable, par le choix partagé d’un ensemble d’objectifs et de moyens, d’inscrire un territoire dans une trajectoire vertueuse.


Consciente des urgences écologique et sociale, elle est tendue vers l’agir et croit en la capacité des projets, engagés en connaissance de causes et d’effets, à influer sur le cours des choses…


Belvédère est lauréat du Palmarès des Jeunes Urbanistes 2022, décerné par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et le ministère en charge de la Ville et du Logement.



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